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L’IA générative et ChatGPT ont capté l’imagination du grand public. Les gérants d’actifs suivent également de près leur évolution.

David Wright, Head of Quantitative Business Strategy, Stéphane Daul, Senior Quantitative Analyst – Pictet Asset Management.

L’apprentissage automatique (machine learning, ML) est salué comme une méthode plus efficace pour la sélection des titres. Pourtant, dans la pratique, les avantages liés à l’utilisation du ML et de l’intelligence artificielle (IA) dans la construction de portefeuille se manifestent sous différentes formes. L’arrivée de l’IA n’est, selon nous, que la dernière phase en date de la longue évolution de l’investissement quantitatif. Nous pourrions parler de Quant 2.0.

C’est dans les années 1980 que les gérants de portefeuille quantitatifs ont commencé à utiliser des algorithmes pour sélectionner les investissements et gérer les risques. Ces modèles simples à facteur unique – qui étaient utilisés pour identifier les primes de risque – se sont rapidement transformés en systèmes multifacteurs plus sophistiqués qui analysaient des phénomènes aussi étendus que l’évolution du sentiment chez les analystes, le positionnement des investisseurs et la stabilité des bénéfices des entreprises. Aujourd’hui, les investisseurs quantitatifs travaillent avec une grande variété de systèmes reposant sur l’apprentissage automatique. Il ne fait aucun doute que cette nouvelle technologie puissante doit être exploitée davantage.

Les applications de l’intelligence artificielle au sein d’un portefeuille

La numérisation de l’économie mondiale a entraîné une explosion des données disponibles, qu’elles soient structurées – comme les données financières communiquées par les entreprises – ou non structurées, comme les textes, les fichiers vidéo et les images. La question des méthodes d’analyse et d’association de ces données à l’aide de modèles de plus en plus grands est à la fois un défi majeur et une opportunité pour les gérants de portefeuille quantitatifs.

L’intelligence artificielle (IA) apporte son aide sur plusieurs fronts :

  1. L’intelligence artificielle peut être utilisée pour extraire des signaux et des modèles à partir de diverses sources de données. L’IA basée sur le traitement du langage naturel (NLP), par exemple, peut être utilisée pour analyser le sentiment à l’égard des entreprises dans les articles de presse, les rapports d’analystes ou les comptes rendus de conférences téléphoniques sur les résultats. Cette solution est particulièrement utile pour les gestionnaires de portefeuilles quantitatifs qui, contrairement aux analystes de sociétés, n’ont souvent pas de réunions avec les dirigeants et risquent donc de passer à côté de signaux plus subtils qui peuvent avoir une incidence sur la performance des actions. Bien appliquées, nous pensons que les techniques qui reposent sur le NLP pour l’analyse des transcriptions de conférences téléphoniques sur les résultats sont souvent capables de détecter des informations pertinentes qui ne figurent pas dans la publication officielle des résultats.
  2. L’intelligence artificielle peut permettre des prévisions en matière d’investissement plus précises. Nous sommes convaincus que les progrès de l’IA permettent d’établir des prévisions plus précises pour les actions individuelles que l’investissement factoriel traditionnel. L’investissement factoriel traditionnel est conçu pour exploiter les primes de risque – des signaux d’investissement fondés sur la théorie économique et étayés par la recherche empirique. Grâce à des solutions d’IA de pointe, l’investissement Quant 2.0 permet aux gérants de portefeuille de détecter des anomalies qui vont au-delà de ces primes. Ces anomalies se produisent souvent sur des horizons temporels plus courts, par exemple de moins d’un mois, un laps de temps au cours duquel le positionnement et l’activité des investisseurs sur le marché ont davantage d’influence sur les performances des actions que les facteurs macroéconomiques ou les fondamentaux des entreprises. Les différentes sources de données peuvent souvent servir de guide sur l’évolution des comportements. L’IA permet d’associer des centaines de caractéristiques. Les investisseurs quantitatifs peuvent donc capter les relations et les interactions entre les données et réaliser des prévisions plus précises.
  3. Les applications de l’intelligence artificielle vont bien au-delà de la sélection de titres. Le nouvel apprentissage automatique peut être appliqué au-delà de la sélection des titres, en incorporant des horizons temporels multiples dans le but de contrôler le risque du portefeuille, de réduire les coûts d’exécution des transactions et d’optimiser le positionnement du portefeuille. Dans une étude intitulée Deep differentiable reinforcement learning and optimal trading (Apprentissage par renforcement différentiable profond et trading optimal), publiée dans la revue Quantitative Finance, notre gérant d’investissement quantitatif Thibault Jaisson, l’expose plus en détail.

Fig 1. L’adoption du ML/de l’IA dans l’investissement quantitatif s’inscrit dans une évolution à plus long terme:

La transparence est fondamentale pour l’utilisation de l’apprentissage automatique dans l’investissement

De nombreux articles de recherche récents ont confirmé les capacités supérieures des modèles de ML en matière de prévision de l’évolution des actions.

Néanmoins, dans la pratique, l’utilisation de modèles basés sur l’IA dans l’investissement est complexe et risquée. La présomption selon laquelle les investisseurs peuvent accepter l’IA comme une boîte noire ne se justifie plus. Il est nécessaire de décomposer les caractéristiques, les positions, les risques et les performances des intrants sous-jacents. La transparence est cruciale, et notre équipe quantitative l’a étudiée en profondeur dans une autre étude intitulée Performance attribution of machine learning methods for stock return prediction (Attribution des performances des méthodes d’apprentissage automatique pour la prédiction des rendements boursiers), publiée dans The Journal of Finance and Data Science.

Quelles sont les conclusions de notre propre analyse de la décomposition des performances ?

Premièrement, une partie du rendement excédentaire des modèles pilotés par l’IA provient de stratégies telles que le «retournement», à savoir les actions qui, en raison d’un profil de performance particulier, sont susceptibles de s’inverser. Ou encore de la «dynamique à court terme», des actions qui poursuivront sur leur lancée. Il s’agit de stratégies employées par les gestionnaires d’arbitrage statistique dans les modèles traditionnels.

Une autre partie de la performance excédentaire provient d’un nombre de caractéristiques beaucoup plus grand que ce qu’il est possible d’utiliser efficacement dans les modèles quantitatifs traditionnels. Les caractéristiques analysées dans les modèles traditionnels se comptent généralement en dizaines. En revanche, les solutions basées sur l’IA peuvent en traiter des centaines et sont également capables d’attribuer un poids plus important aux caractéristiques ayant le plus d’impact positif sur les performances.

Enfin, la dernière partie de la performance excédentaire provient des effets d’interaction entre les caractéristiques intégrées à l’analyse. Par exemple, les actions qui bénéficient d’un sentiment positif de la part des analystes et d’un faible intérêt pour la vente à découvert – où seuls quelques fonds alternatifs détiennent une position short – n’évolueront pas de la même façon que des actions qui connaissent une situation opposée.

Le jugement humain reste essentiel dans la mise en œuvre de l’intelligence artificielle

La création d’un modèle de ML fiable, rapide, précis et pouvant être suivi et adapté en continu est un processus complexe et chronophage. Les modèles de ML utilisent des volumes de données élevés, ce qui complique le suivi pour les gérants de portefeuille et les analystes individuels.

Un seul gérant de portefeuille ne suffit pas. Vous devez disposer d’une plateforme robuste si vous souhaitez utiliser l’IA pour vos investissements –Stéphane Daul, Senior Quantitative Analyst

Modèles IA:

  • Exigent des gérants qu’ils effectuent plusieurs ajustements, et comme des changements mineurs peuvent entraîner des différences de résultats considérables, ces changements doivent être évalués en permanence.
  • Dépendent de données du monde réel pour les prédictions, de sorte que si ces données changent, le modèle doit lui aussi changer. En tant que gérants de portefeuille, nous devons donc suivre l’évolution des nouvelles données et nous assurer que le modèle apprend en conséquence.

Pour surmonter ces difficultés, une robuste plateforme opérationnelle consacrée à l’IA est essentielle. Elle doit être équipée d’outils spécifiques garantissant la reproductibilité, le contrôle des versions, les possibilités d’extension et la conformité.

Le déploiement de l’IA dans la construction de portefeuille nécessite une collaboration transparente entre les ingénieurs, les experts en sciences des données et les gérants de portefeuille, dans le but de créer un processus décisionnel transparent capable de générer de l’alpha.

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